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Pin Up Girls
T1 |
Edition originale |
EO
10/2002 |
Mon
édition |
EO |
Cote 01/03 |
NC/NC |
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Résumé T1
ENFANT JE NE DESSINAIS JAMAIS DE FEMME.
Au commencement Fred Beltran ne dessinait pas de pin-up. D'ailleurs il
ne dessinait pas de filles du tout, préférant les personnages masculins
plutôt difformes et presque grotesques. Mais avec le temps et
l'expérience des choses vécues, les filles de papier sont devenues un
sujet majeur de son imaginaire.
Les illustrations présentées dans cet ouvrage ont été réalisées entre
1994 et 1998 pour diverses publications, essentiellement Jeune et Jolie
et Jazz Magazine. S'agissant de Beltran, auteur d'oeuvres aussi
décapantes et rock'n'roll que Le Ventre du Minotaure ou Megalex, de
telles collaborations peuvent paraître incongrues. C'est le hasard qui a
d'abord poussé l'illustrateur vers ces mondes si éloignés de son propre
univers. Ensuite, la qualité du contact, un certain goût du défi et la
liberté de créer ont fait le reste.
Tout au long de son parcours avec Jeune et Jolie, il a bénéficié d'une
totale autonomie et d'une marge de manoeuvre impériale. Quelques
indications pour fixer la thématique, et ensuite à luide s'exprimer - ce
que, on en jugera, il n'a pas manqué de faire. Car en feuilletant le
présent ouvrage, difficile de dire que la rencontre n'a pas été heureuse
! Beltran a eu le loisir d'exercer son trait et de façonner avec un
appétit renouvelé tes girls de ses rêves. Gageons que le magazine y a
gagné quelques modèles d'éternel féminin d'un nouveau genre...
Avec Jazz Magazine, tout découle d'une rencontre improbable. À la fin
des années 1980, par l'intermédiaire d'un ami dans la place, Fred
Beltran croise le très sérieux Philippe Caries, rédacteur en chef d'une
publication exigeante, adulée des vrais amateurs de la musique
afro-américaine. Le journaliste n'en apprécie pas moins son travail et
lui demande d'illustrer un sujet sur le jazz en Afrique du Sud. Beltran
met en scène un orchestre black tapant un boeuf furieux sur fond de rues
envahies par les véhicules antiémeutes. Explosif dans le contexte d'une
revue adepte de rigoureuses photos d'un noir et blanc sobre et glacé, et
au swing tout intérieur ! Viendra ensuite en 1990 une couverture
d'anthologie présentant les « 80 CD des années 80. » Là, c'est un
rappeur au look gangsta dont le cou est orné d'un collier de CD.
Découvrant alors le goût de Fred Beltran pour les Pin-Up, Philippe
Carles, désormais prêt à risquer l'image de marque de son journal lâche
: " Pourquoi tu ne m'en ferais pas une ? » Fred répond... "Chiche!"
Evidemment. Ainsi naquirent, entre autres, une égérie des plages de
palaces, une amazone en scooter, une conductrice dont rêvent tous les
auto-stoppeurs et une madone des sleepings.
Outre les images réalisées pour Jeune et Jolie et Jazz Magazine, cet
ouvrage présente diverses illustrations destinées à d'autres supports :
une héroïne de dessinée pulpeuse comme une star de cinéma italienne, un
motif aquatique mettant en scène un trio de naïades à imprimer sur un
paréo de Georges Rech, le personnage de Nina paru chez l'éditeur
japonais Kodansha, et deux groupies furieusement rock'n'roll
spécialement dessinées pour illustrer les pochettes de disque d'Alteau
et les Bad Lieutenants. Une façon de rappeler que c'est à Alteau,
confrère dessinateur et musicien, que Fred Beltran doit d'avoir
persévéré dans la bande dessinée pour devenir le créateur qu'il est
aujourd'hui.
Sur le plan technique les conceptions de Fred Beltran sur les pin-up s'incrivent
dans la continuité de son travail visant à mobiliser, à un niveau jamais
atteint jusque-là, tous les moyens de l'ordinateur. La partie la plus
spectaculaire de cette mise en oeuvre peut se contempler dans sa série
de bande dessinée, Megalex, sur des scénarios d'Alexandre Jodorowsky.
D'ailleurs familiers de ce versant de sa création reconnaîtront sans
peine la filiation entre ses pin-up et les héroïnes renversantes de
sex-appeal qui peuplent les pages de Megalex. Rompant avec le tandem
papier-crayon, il s'en remet exclusivement au stylet et à la palette
graphique. Surprise : l'interface numérique n'enlève rien à la
sensualité exprimée par l'artiste.
Le présent ouvrage ajoute une dimension au travail de Fred Beltran : la
mise en scène de Thierry Frissen et Lan Sattler. Ce sont eux qui ont, à
coup de slogans aguicheurs et de typos plus vraies que nature, gentiment
détourné toutes ces dames de leur contexte initial. Ils les ont placées
dans un monde de rêve et d'humour qui leur donne aujourd'hui ce petit
parfum d'éternité auquel Fred Beltran n'avait sûrement pas songé
lorsqu'il a commencé à les créer.
Et pourtant malgré cela, qui d'autre que Fred Beltran
pouvait avoir les mots de la fin?
Fred Le Berre
Alors première question, pourquoi les pin-up ?
Qu'est-ce qui vous attire dans cette forme particulière d'illustration ?
Enfants, je ne dessinais que des personnages masculins, des héros et des
scènes d'action. Et puis j'ai découvert la vie, et les femmes sont
forcément devenues ma première source d'inspiration ! Les pin-up ne
pouvaient qu'être l'aboutissement logique de ce cheminement.
Pour vous. quelle est la ville du monde où les femmes
sont les plus proches de ce qu'est une pin-up ?
Paris, sans hésitation. Et c'est d'ailleurs pour ça qu'ici tout est
tentation...
On dit parfois qu'une pin-up sommeille en chaque
femme. Qu'en pensez-vous ?
Franchement, je ne sais pas. Les femmes sont parfois si...
mystérieuses. Je me demande s'il existe un homme capable de vraiment les
comprendre. Cela dit, les pin-up sont l'expression graphique de la
séduction que les femmes exercent sur nous, les hommes, tour à tour
naïfs et rêveurs, et souvent complices.
Pour vous, comment est la pin-up idéale ?
J'aime ce petit mélange de fragilité et de provocation. Par exemple,
une fille au corps voluptueux, mais avec un petit quelque chose
d'angélique sur le visage, ou encore une fille extrêmement stricte
d'allure dont la froideur apparente est démentie par un petit sourire
aguicheur, presque pervers...
S'il vous fallait absolument choisir, lesquelles prendriez-vous, les
blondes, les brunes ou les
rousses ?
Oh, je les prends toutes... Mais je dois bien dire que j'ai un petit
faible pour les brunes...
Quel type de musique écoutez-vous et est-ce que la musique influence
votre travail sur les
pin-up ?
Pendant longtemps, je n'ai écouté que du jazz et du rock'n'roll des
50's. Depuis, je me suis ouvert à d'autres types de musiques, mais je me
sens particulièrement en phase avec cette époque. Bien sûr, cela ne
manque pas de transparaître dans mon travail...
Donc si je vous dis « Scorpions » ou « Duran Duran » ?
Je réponds le « Brian Seltzer Orchestra ! »
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur votre travail ? Comment
procédez-vous étape par étape ?
Le plus important, c'est le cadre général, la mise en scène. Ensuite, je
cherche la posture idéale, celle qui met le mieux en valeur les courbes
du modèle. Enfin, lorsque l'image est en place, je consacre un grand
moment au visage, à l'expression des yeux et à la bouche. C'est là tout
le secret... À dire vrai, je n 'ai pas de méthode particulière. Tout
tient à la qualité de la relation qui s'établit entre la pin-up
et moi.
Pour quelle raison avez-vous choisi de travailler exclusivement sur
ordinateur ? Quel est le plus de l'outil informatique ?
En effet, toutes mes pin-up sont créées sur ordinateur, dans un logiciel
de création graphique. Avant, j'utilisais les outils traditionnels, mais
aujourd'hui je m'en remets uniquement à l'informatique parce que cela me
permet de travailler à une très grande échelle, si besoin est, ou encore
de faire des gros plans sur mes « créatures ». Assez bizarrement, malgré
la réputation qu'on fait à l'informatique d'être un outil froid et
impersonnel, mon travail reste extrêmement sensuel. Par exemple, lorsque
je travaille un visage, l'écran devient comme une fenêtre par laquelle
le modèle me regarde... Ensuite, lorsque je passe au décolleté ou aux
longues courbes vers la chute des reins, j'ai l'impression d'être le
spectateur inattendu et privilégié d'un spectacle secret...
Quelle personne célèbre choisiriez-vous de transformer en pin-up ?
Gène Tierney (dans « Laura ») pour le visage. Sofia Loren (celle des
années 1950) pour le corps. Et Audrey Hepburn (dans « Roman Holiday »)
pour la grâce.
Enfin, pour chacun des mots suivants, dites-nous ce qu'ils vous
inspirent spontanément?
Les femmes... La vie.
La couleur bleue... Une petite robe d'été... d'une professeur de
collège.
L'alcool... Avant.
Le sexe... Pendant.
La cigarette... Après.
La douceur... Le toucher.
L'amour... L'amour.
Les pin-up... La séduction.
(Source ce livre fabuleux sur les pin-up qu'est Pin Up
Girls évidemment ;o) |