Une galaxie nommée Aquablue (Dossier réalisé par Thomas Ragon pour Pavillon Rouge N°13)

2002, l'Odyssée d'Aquablue est relancée ! Au moment où sort le tome 9 de la saga, nous apprenons qu'elle se dédouble... Ce scoop, dont Pavillon Rouge a évidemment eu l'exclusivité, s'accompagne d'une histoire complète (p92) qui démontre l'énergie toute particulière dont brille la galaxie Aquablue... Le moment est idéal pour l'explorer dans ses moindres recoins.

Génération Aquablue

Quand, en 1987, Thierry Cailleteau et Olivier Vatine s'attellent à la série, ils ne sont encore que deux jeunes pousses prometteuses vues dans Circus et Pilote. Quatre albums plus tard, ils sont reconnus par le public, la critique, et la profession.. . Mais, surtout, ils ont en main un univers incroyablement riche, cohérent et maîtrisé !
Cette richesse et cette cohérence, mâtinées d'un humour narquois combiné à un souffle épique, rendent la série enthousiasmante, que l'on ait onze ou cent onze ans. Le récit laisse transparaître une grande sincérité, sans naïveté ; sincérité que le scénariste revendique. Son credo : faire une bande dessinée populaire à grand spectacle, non dénuée de valeurs humanistes.
Dès les premiers albums, les thèmes forts sont présents : écologie, tolérance, refus du racisme... "Je vis dans ce que j'écris. Aquablue, c'est une évasion de ce monde extérieur qui est assez dur. Mais surtout, je crois à l'existence du Bien et du Mal, des valeurs qui ne doivent pas appartenir qu'aux intégristes. Elles font partie d'un certain humanisme, elles sont aussi des valeurs laïques... Alors oui, Aquablue est morale. En fait, en écrivant, /e m'immerge, et j'espère que le lecteur aussi, dons un univers solide et positif. Ma devise est plutôt "à cœur vaillant rien d'impossible" et certainement pas "la fin justifie les moyens", une devise trop présente aujourd'hui. » d'expliquer
Thierry Cailleteau. Dictature, ordre moral et corruption, consortium tout-puissant...
Attention, Aquablue n'est pas une bande dessinée « à message ». Son but est de divertir en prônant des valeurs apolitiques et universelles. «Aime ton prochain », telle est la conclusion à laquelle tendent tous les albums. Et ce n'est jamais facile, car les gens de bien ne cessent de rencontrer des monstres, et se doivent de lutter.
Et la baston ? Les dessinateurs des albums sont parmi les meilleurs pour vous en mettre plein la figure !
Olivier Vatine, d'abord, dynamise les scénarios, et donne à la série des années d'avance en S-F : cadrages serrés, encrage à l'américaine, designs pointus (avec, pour le tome 4, la contribution de Fred Blanchard)... Un énorme talent au service de l'action et du récit. Après quatre albums, un dessinateur, déjà reconnu, prend la relève : Ciro Tota. Précision, cadrage au cordeau, générosité... Le travail de l'auteur de Photonik et de Fuzz & Fizzby apporte une nouvelle touche aux albums.
De ce cocktail naît une série qui, à chaque album, offre d'embarquer pour une longue traversée... et d'en redemander. Quel meilleur signe de réussite ?

 


L'avenir d'Aquablue ? Deux nouvelles séries
Big bang dans la galaxie Aquablue ! En 2003, ce sont deux albums de la série mythique qui devraient orner les étals de vos librairies préférées : Fondation Aquablue et Planète Aquablue. Deux projets bien distincts, nés d'un même univers, menés de front par deux équipes de choc. Ce dédoublement, couplé à l'apparition d'un nouveau visage dans l'équipe (Siro), est le fruit d'un autre événement d'importance : le retour d'Olivier Vatine ! Thierry Cailleteau, maître d'oeuvre de la série, nous explique comment ce fantastique projet a vu le jour : " Ciro et moi avions des envies divergentes sur l'avenir de la série. Lui désirait moins de "techno", et la planète Aquablue lui manquait beaucoup. Moi,je voulais continuer dans le sens de la SF. Et puis il y a eu l'opportunité de s'occuper de Fondation Aquablue avec l'équipe Vatine, Blanchard et Siro. Voilà, c'est aussi simple que ça. »

"Il est très enthousiasmant de voir qu'un album, qui a maintenant quinze ans, peut encore évoluer."' Th. Cailleteau


• Fondation Aquablue
Thierry Cailleteau au scénario, Siro au dessin, Olivier Vatine au story-board, Fred Blanchard au design, et Sandrine Cailleteau aux couleurs. Telle est la composition de la nouvelle équipe qui présidera aux destinées de Fondation Aquablue, la suite des aventures de Nao, Dupré, Rabah, Carlo et de l'Uruk-Uru. À la question « Quelle sera la prochaine étape de la mission scientifique de Nao ? », les sourires de connivence se font nombreux, et le silence reste de mise. Néanmoins, quelque informations filtrent : une planète intrigante, des trésors archéologique et beaucoup, beaucoup de surprises...

• Planète Aquablue
Parallèlement à la suite des aventures de Nao, Ciro Tota réalisera scénario et dessin pour une nouvelle approche du monde d'Aquablue. Son but : orchestrer la découverte, en profondeur, de la planète Aquablue. Car celle-ci reste encore largement inconnue des lecteurs de la série, et son exploration promet moult aventures !
Le décor ainsi planté, partons à la rencontre des artisans de cette oeuvre incontournable.

 

Thierry Cailleteau

Quels ont été les éléments de départ pour ces deux derniers tomes. Le Voïvode, la planète préhistorique, les chasseurs...
Étant fasciné par les dinosaures depuis mon enfance, il était logique que ces grosses bestioles finissent par se retrouver dans une de mes BD. On n'arrête pas le destin ! Fondation Aquablue et Le Totem des Cynos en ont été l'opportunité, grâce à Ciro Tota et à sa coloriste, qui ont
trouvé là l'occasion de nous offrir quelques magnifiques dessins dignes de ces illustrations de dictionnaire, à la lettre « D », sur lesquelles j'ai tant rêvé dans mon enfance. La thématique des chasseurs s'est imposée d'elle-même puisque c'est aussi un de mes sujets récurrents. Nous l'avions déjà traité, avec Olivier Vatine, dans une aventure de Fred et Bob. Je ne suis pas contre la chasse par principe. Lorsque la faim vous tenaille, il
est légitime de tuer pour se nourrir. En revanche, si l'on prend en compte le prix du fusil, de l'équipement, des cartouches et du permis de chasse, on constate que le prix de revient de la viande chassée dépasse de loin celui affiché à l'étal du boucher, en général voisin du lieu de chasse. Dans nos pays où le cholestérol fait plus de victimes que la famine, il est évident que l'acte de chasser ne perdure que parce qu'il satisfait certains instincts prédateurs ancestraux. Or, ce n'est qu'en dominant ces instincts que l'on devient un homme civilisé.
 

Nao

Sauvé miraculeusement de la catastrophe survenue au vaisseau qui transportait ses parents, Wilfrid Morgenstern n'est qu'un bébé quand il se retrouve dans une capsule de sauvetage perdue dans l'espace, orphelin, et avec comme toute compagnie un robonurse, Cybot. A l'âge de huit ans, la capsule repère une planète habitable, presque entièrement recouverte par les océans, et parsemée d'archipels. Recueilli par un peuple aquatique qui voit en lui un élu de leur Dieu. Nao va les aider à détruire la menace industrielle et écologique apportée par les Terriens.

Le côté engagé de ton travail est-il très conscient ?
J'aime raconter des histoires où l'aventure et l'épopée ont la part belle. Cela correspond tout simplement à mes goûts de lecteur. Cependant, au-delà de l'aspect ludique et jubilatoire de ce type d'écriture, se pose la question du contenu « moral » du récit. En effet, il est très facile, voire tentant, de se laisser aller à une approche réactionnaire des choses et de tomber dans ces panneaux qui vous amènent, par exemple, à justifier la violence sous prétexte d'autodéfense, et à finalement glorifier la loi du plus fort et cautionner tous les abus qu'elle induit. Le « Dieu pardonne, moi pas » de Rambo est l'illustration parfaite de ce que je cherche à éviter d'écrire, tout en reconnaissant moi-même avoir déjà fauté de ce côté-là. C'est pourquoi je pardonne Rambo ! Derrière le ton épique de mes histoires, je cherche à faire passer des valeurs humanistes simples et positives, comme le respect et la tolérance, ou tout bêtement l'honnêteté. Quand on s'adresse à un lectorat âgé de 7 à 77 ans, on ne martèle jamais assez ces valeurs de base. Certains nous ont souvent reproché cette approche, qualifiant de niaiserie un peu lourde la façon dont les troupes d'Ulla Morgenstern, dans Aquablue, ont une parenté trop voyante et prévisible, à leur goût, avec les nazis. J'ai entendu les mêmes choses à propos d'Anachron (Vents d'Ouest) dont le fil conducteur est la poursuite d'un gouvernement néo-nazi en fuite sur une planète médiévale. Après avoir vécu les deux tours des dernières élections présidentielles, j'espère que ces grands esprits ont enfin réalisé « l'utilité publique » de cette démarche qui consiste à répéter, à chaque fois que l'occasion se présente, que la tolérance est toujours dans le camp des « gentils », quitte à être manichéen. Je persisterai.

Cybot

Le petit robonurse modèle 57 est tout à la fois le frère, le père et la mère, le meilleur ami et le conseiller préféré de Nao. Si son mauvais caractère et sa maladresse sont notoires, les services rendus à son « maître » en font l'élément indispensable de la réussite du Terrien. Mais on n'est pas le robonurse de Nao Morgenstern sans avoir une vie mouvementée : Cybot a connu deux morts et autant de résurrections en vingt ans de vie commune !


Tu me disais un jour que ce qui compte, ce n'est pas forcément la fin de l'histoire...
Un récit est un peu comme un tour du monde : ce n'est pas uniquement le dernier pays visité qui compte, mais aussi l'ensemble du voyage, vécu au jour le jour. Trouver une bonne fin à une histoire est évidemment extrêmement important, car c'est sur cette dernière impression que le lecteur va rester en refermant l'album. Encore faut-il que ce lecteur se sente bien durant tout le parcours menant à cette fin, pour qu'il ne vous quitte pas en route. Chaque petite anecdote du récit prend alors toute son importance, même si elle n'est pas directement liée à l'intrigue principale.

Conseil de Pro : Thierry Cailletteau nous fait partager son expérience

On doit souvent te demander des conseils pour devenir scénariste ?
S'il y a un seul conseil technique de base que je pourrais donner à un aspirant scénariste, ce serait de bosser l'orthographe et la grammaire. Un scénario plein de fautes d'accord, de syntaxe, voire d'étourderie, trahira votre inexpérience et vous empêchera de vous faire respecter ou, pire, de faire passer votre message. Imaginez que votre dessinateur vous livre une page pleine de taches d'encre, vous ne le prendriez pas au sérieux. La faut d'orthographe est donc au scénariste ce que la tache est au dessinateur : on a le droit d'en faire de coup plus faciles à digérer lorsqu'elles sont formulées avec un minimum de courtoisie, et quand le « rubriquard » s'abstient de faire quelques bons mots à vos dépens pour enluminer un peu sa pige acerbe. Je regrette parfois l'époque où il était permis de défier un temps en temps, mais il faut les traquer et les gommer avant de livrer ! Et une fois que l'on maîtrise cela ? Eh bien, le plus dur reste à faire !

Toi, comment as-tu appris ?
Je suis un fan qui s'est mis au scénario, un autodidacte. J'ai lu un seul livre sur le scénario de toute ma vie ! En fait, je pense avoir une certaine capacité à prendre du recul sur ce que je fais, de pouvoir me relire. L'inconvénient c'est que j'oublie ce que j'ai fait au fur et à mesure ! Sinon pendant quatre ans, quand je lisais un roman, je le relisais deux ou trois jours après. C'est chiant parce qu'il n'y a plus la surprise, mais ça aide à démonter la mécanique.


"Aquablue c'est du space-op avec une base réaliste." F. Blanchard


Quel est le plus beau compliment jamais fait sur qu'on vous ait Aquablue ?
Celui qu'on nous a fait sur cette série est très simple, et nous avons la chance que nos lecteurs nous le répètent à intervalles réguliers : « Merci, pour les bons moments passés grâce à vous. » Là, on se dit : mission accomplie !


La critique la plus juste et la plus injuste ?
Je confesse en toute mauvaise foi que l'ai bien du mal à accepter les critiques, qu'elles soient justes ou injustes. On ne se refait pas ! Elles sont cependant beaucoup plus faciles à digérer lorsqu'elles sont formulées avec un minimum de courtoisie, et quand le "rubriquard" s'abstient de faire quelques bons mots à vos dépens pour enluminer un peu sa pige acerbe. Je regrette parfois l'époque où il était permis de défier un critique en duel. J'aurais déjà quelques morts sur la conscience ! Je ne crois pas qu'il faille clouer un auteur au pilori parce qu'on n'a pas aimé son livre. Je comprends qu'un critique intègre ait le devoir de le déconseiller à ses lecteurs, mais pourquoi se laisser aller au règlement de compte et au lynchage ? Je ne connais pas un auteur qui ne donne pas le meilleur de lui-même dans ce qu'il propose à ses lecteurs. Chacun faisant selon ses moyens, certaines œuvres sont mieux réussies que d'autres. Ceux qui échouent n'en sont pas pour autant de cyniques faiseurs ni des escrocs, et n'ont pas à être traités comme tels.
La critique la plus injuste que j'ai pu lire à propos d'Aquablue est la suivante, et elle nous revient périodiquement, preuve que la stupidité, tel le Phénix, renaît toujours de ses cendres : « Le dernier est nul. C'était mieux avant. Ils ne bossent plus que pour le fric ! » Je ne prétends pas tirer le diable par la queue, mais, très franchement, quand on connaît l'économie d'une BD, même en cas de succès, on se dit qu'on gagnerait mieux sa vie en vendant des armes ou en passant à Star Academy. La BD est une passion, et je continuerais à écrire des histoires même si j'empochais la super-cagnotte du Loto ! C'est peut-être cette passion que nous jalousent les aigris qui vomissent régulièrement, sans preuve aucune, ce genre de réflexion.

"Je ne connais pas un auteur qui ne donne pas le meilleur de lui-même dans ce qu'il propose à ses lecteurs" Th. Cailleteau

Mi-Muee

Cette femme de caractères, qui n'a rien d'une potiche, a trouvé l'âme soeur en Nao. Pour lui elle ira jusqu'à embarquer clandestinement dans un vaisseau de la Texec en partance pour la Terre, dans l'espoir de le retrouver. Elle se battra à ses côtés, résistera à la torture. Quand Nao, sur Doyle-1800, sombre dans le coma, il apprend en rêve l'heureuse nouvelle : Mi-Muee attend un enfant !

Au moment où Aquablue va prendre un nouveau tournant, comment juges-tu son évolution depuis les débuts ?
À la réflexion, je constate que la série a finalement peu évolué sur le fond, depuis ses débuts. L'évolution a été surtout technique. Lorsque |e relis le tout premier album, j'ai un peu de mal à supporter toutes les maladresses scénaristiques que l'ai commises Fort heureusement, l'énergie et la sincérité que nous y avons mises font que l'ensemble de l'album passe en force, à l'affectif. Et c'est finalement l'essentiel.
J'avoue cependant être parfois très tenté de le réécrire intégralement, et de le voir redessiné par Vatine à cette occasion, un peu comme Hergé l'a fait avec certains de ses premiers récits. La chose étant un peu compliquée à mettre en place, nous allons toutefois proposer prochainement des rééditions des deux premiers albums, avec de nouvelles couleurs par Christophe Araldi. Celles que j'avais faites à l'époque me sortent maintenant par les yeux ! Il est très enthousiasmant de voir qu'un album, qui a maintenant quinze ans, peut encore évoluer. La BD est une langue vivante !



Olivier Vatine
 

Tu retrouves Thierry pour un nouveau départ sur Aquablue, sur quoi étiez-vous d'emblée en accord ?
Déjà, on s est retrouvé tout court et c'est plutôt sympa de reformer l'équipe après que chacun a fait ses propres expériences. Ensuite, le choix de Siro pour le dessin nous est rapidement apparu comme une évidence. Voilà pour l'harmonie.


Cela fait neuf ans que tu as dessiné le tome 4, tu viens de faire cinq pages de story-board, qu'est-ce qui a changé dans ton travail pendant ce laps de temps ?
Je ne sais pas trop... J'espère juste que |e n'ai pas trop perdu la spontanéité du boulot que |e faisais à l'époque au profit d'un côté plus « praticien » qui finit toujours par s établir sournoisement. Mais bon, je compte sur les potes pour me faire corriger le tir le cas échéant.


Fred Blanchard

Tu reviens à Aquablue dix ans après. Comment le vis-tu ?
J'ai rencontré Olivier peu de temps avant de participer au tome 4. C'est comme retourner aux sources, ou boucler une boucle, ça a tellement marqué à l'époque... C'est aussi une surprise. Et ça relance la collaboration entre Olivier et Thierry dix ans après, ce qui est vraiment une bonne chose !


Tu es déjà au travail ?
Bien sûr ! Il y a beaucoup de choses à faire... Même si j'ai déjà pas mal planche... Par exemple, j'ai déjà modélisé et rationalisé au maximum l'Uruk-Uru, le vaisseau de Nao. Idem pour le voilier solaire de l'histoire courte de ce numéro, qu'on pourrait peut-être retrouver plus tard. Mais il y aura de toute façon d'autres vaisseaux, de nouveaux peuples avec leurs architectures, des machines et des armes, des éléments récurrents et ponctuels dans les futurs albums.
 

Histoires de couleurs

Nao et Planète Bleue on été mis en couleurs par Thierry Cailleteau. Le Mégophias, Corail Noir et les deux Etoile Blanche par Isabelle Rabarot. Projet Atalanta par Florence Breton, et Fondation Aquablue et Le totem de Cynos par Sandrine Cailleteau. Un nouveau coloriste au palmarès. En effet, Christophe Araldi va entièrement refaire les deux premiers tomes de la série. Parution de ces tomes en début d'année 2003.


Quelle direction prends-tu pour ces albums à venir ?
Aquablue c'est du space-op avec une base réaliste. On sera dans la lignée des tomes 3 et 4 : une S-F crédible dans le style de 2001 ou Alien, un peu dans l'esprit de ce que fait un Ron Cobb (designer sur Les Aventuriers de l'Arche Perdue, Abyss, Conan ou Star Wars, notamment), c'est-à-dire essayer de rationaliser autant que possible des idées « fantaisistes ». Là, il y aura une esthétique industrielle, et des choses très étranges, comme une espèce de grosse machine/chenille qui creuse un canal... Je ne sais pas si j'ai le droit de dévoiler quelque chose... Je préfère ne pas en dire plus !

Doyle-1800

Cette planète présente de fortes similitudes avec notre Terre de l'époque préhistorique. Elle est habitée par toute une faune de dinosaures, et une espèce primitive intelligente, mi-homme mi-loup, s'y est épanouie. Nao et la Fondation Aquablue sont sur Doyle-1800 pour une terrible raison ! cette planète est condamnée à brève échéance par une sorte de trou noir (un voïvode), et le but de nos héros est de sauver le maximum d'animaux avant le cataclysme. Cette opération permettrait en effet de faire avancer la compréhension de l'histoire de la Terre.



Pourquoi un poste de designer ?
En fait, en scindant les postes, on se donne les moyens d'avoir plus d'ampleur, d'aller plus loin dans les idées et d'être plus dynamique. Là, je prends en charge peut-être 50% du total de dessins et recherches à faire. Mais je suis avant tout au service de Siro. Je lui fais deux ou trois propositions par élément, je fournis des familles de formes où il peut piocher, des « kits » prêts à l'usage, ou à décliner. L'essentiel c'est qu'il puisse utiliser et reprendre tout ça à sa manière, et qu'il se sente à l'aise.

 

Ciro Tota
 

Quelle satisfaction retires-tu de ces deux albums. Fondation Aquablue et Le Totem des Cynos ?
C'est d'avoir commencé et fini une histoire, d'avoir pu maîtriser le projet du début à la fin. Tout en sachant qu'il faudra faire mieux la prochaine fois. Cette histoire en deux albums, c'était différent de ce que j'avais fait auparavant sur Aquablue, beaucoup moins S-F. Graphiquement, c'était presque un nouveau départ. Par exemple, c'était la première fois que je dessinais des dinosaures. Ce n'était pas facile, jusqu'à ce que je voie à la télévision des reconstitutions de dinosaures en mouvement. Une fois que j'avais vu ça, c'est venu tout seul.



"En scindant les postes, on se donne les moyens d'avoir plus d'ampleur, d'aller plus loin dans les idées et d'être plus dynamique." F. Blanchard

 

Si je te demande de mettre ta légendaire modestie de côté, quel jugement portes-tu sur ton travail ?
Je pense avoir un dessin très lisible, avec de la profondeur, et une narration plutôt pas mauvaise.
Mais il faudra faire mieux la prochaine fois ! En bande dessinée, c'est difficile de se fixer des objectifs précis, de voir loin. Maintenant, m'essayant aussi au scénario, je prévois ce à quoi je vais me heurter. Mais en général, en BD, on travaille plutôt dans le court terme... Le plus embêtant, en fait, c'est de ne pas vraiment savoir ce que le public pense de notre boulot. On manque de recul par rapport à ça. Je ne suis jamais vraiment certain que je fais du bon travail. Alors pour chaque dessin, chaque case, je fais en sorte qu'on ne puisse rien me reprocher.

Tu attaques un nouveau projet dans l'univers Aquablue. C'est un retour aux sources de la série, c'est ça ?
Oui. Avec Planète Aquablue, on va revenir sur le monde où a échoué Nao. J'avais envie de l'explorer à fond. Aujourd'hui, tout ce que l'on connaît de la planète, c'est Ouvéa, l'île des Initiés, une banquise, et la cité engloutie des Atalans. On découvrira qu'il y a une myriade d'archipels, avec une multitude de peuples différents. Ce sera de l'heroic fantasy mâtinée d'un peu de S-F, plus «ethnologique". Mon point de départ (et à l'heure actuelle je ne veux pas en dire plus), ce sera un groupe de Bleus (les habitants originels de la planète, ndlr), l'enfant de Nao et Mi-Nuée, qui seront investis d'une tâche démesurée à accomplir : nouer des liens entre tous ces archipels. Il y aura beaucoup d'intérêts particuliers qui s'entrecroiseront, et les Atalans aussi joueront leur rôle. Et puis, il y a le fait que, ne l'oublions pas, les Terriens avaient commencé à coloniser Aquablue, et pas de la meilleure des façons !


 

Carlo et Rabah

L'un est italien, l'autre kabyle. Ils sont connus longtemps avant qu'ils ne rencontrent Nao, dans des circonstances inconnues pour le moment et probablement un peu troubles. Car ces deux pilotes hors-pair sont aussi des grandes gueules, le genre à ne pouvoir s'empêcher de se moquer ou faire n'importe quoi... Lors de leurs retrouvailles, Rabah servait à bord du Mégophias, le vaisseau pirate du capitaine Lochshore. Il n'hésita pas à déserter pour rester fidèle à la solide amitié qui lie les deux hommes. Carlo est l'heureux propriétaire du Stromboli, un vaisseau auquel il tient plus que tout et dont les qualités techniques rendront d'immenses services. Ils forment tous deux un duo aussi explosif qu'attachant ; quand il aiment, c'est pour la vie.

 

Qu'est-ce qui t'excite le plus dans ce nouveau projet ?

C'est de faire le scénario et de retrouver l'esprit du début de la série. Il faut définir les différents peuples et leurs coutumes... C'est un monde qui se découvre et qui est constamment sur la défensive. Graphiquement, le fait qu'il y aura beaucoup de nature à dessiner sera pour moi un grand plaisir. Et puis surtout, tout reste à inventer !

 

Maurice Dupré

Cet ancien président de la commission "éthique" au Conseil des Cinq Continents, viré pour cause d'opinions anti-colonialistes et écologiques, a été muté sur la planète couverte d'eau et abandonné par sa journaliste de femme, Béa. Premier humain rencontré par Nao sur Aquablue, il épousa très vite la cause de Nao, comme celle qu'il tente de défendre depuis longtemps. Il en profite pour arrêter de boire et jouer un rôle important dans la libération de la planète. En tant qu'ami et scientifique, il rejoint tout naturellement l'équipe de la Fondation Aquablue.


Siro (Petit dernier à rejoindre le gang Aquablue, Siro a accepté de jouer le jeu d'une interview express.)

Influences ? Parcours ?
Oh, les influences.,, Ça va de Frazetta à Syd Mead, Liberatore, Geof Darrow, Dave Stevens, Steve Rude... J'ai lu tout ça après avoir découvert les super héros de la Marvel, bien sûr, le point de départ, comme pour beaucoup. C'est à l'école que ça s'est gâté. École d'arts appliqués, un an, fac d'arts plastiques, option tourisme. J'avais même loupé d'un point l'entrée aux arts déco. Je n'ai jamais vraiment fait carrière à l'école. J'ai démarré chez Zenda avec les deux albums Master Volume en 92 et 94. Et puis j'ai rencontré Didier Convard, et on a démarré Polka dans la foulée. En parallèle, j'ai donné aussi dans la pub et l'illustration de romans jeunesse.


"Le plus embêtant c'est de ne pas vraiment savoir ce que le public pense de notre boulot." C. Tota
 

Le dessin ?
C'est un bonheur, ça me fait vivre, et accessoirement, c'est parfois douloureux. Petit, ça me fascinait, Je pensais qu'un dessinateur devait avoir un sixième sens pour faire apparaître sur le papier ce que personne d'autre n'avait vu avant lui, vu que la page était encore blanche. Et puis j ai compris que c'était à 90 % une affaire de travail. Mais la fascination est restée quand même.

Comment se passe la collaboration avec Olivier, Thierry et Fred, concrètement ?
Très très bien. Sur le scénario de Thierry, Olivier et Fred font tout le boulot de préparation en amont. Fred développe les designs, Olivier le story-board. Et je récupère tout le matériel pour en faire une planche aboutie. Pour l'instant, ça me va très bien. On verra comment tout ça évolue, mais pour démarrer, ça me rassure de ne pas être seul aux commandes. Le boulot d'équipe fonctionne comme
une petite mécanique qui s'enclenche très bien. On est sur la même longueur d'onde.

Qu'est-ce qui est ou sera le plus difficile pour toi ? Le plus facile ?
L'idée est de garder ce que j'ai en commun dans mon style avec celui d'Olivier, ce qui se fait assez naturellement, vu que j'ai beaucoup regardé et appris de lui auparavant. Mais sans perdre de vue ma vision des choses. Je serais bien incapable de faire du Vatine, de toute façon. Nao sous ma patte se rapproche du Nao des origines par exemple, tout en étant sensiblement différent. C'est tout dans la nuance, et pas forcément facile, d'ailleurs. Carlo et Rabah, ou même Cybot me viennent beaucoup plus naturellement. J'essaie de ne pas calculer. L'essentiel est que je m'amuse.
 

"Je continuerais à écrire des histoires même si j'empochais la super-cagnotte du Loto" Th. Cailleteau.
 

Aquablue, la planète

Olivia : une superbe petite Ile paradisiaque, où vivent de paisibles pêcheurs. Les habitants d'Ouvéa croient en Unruk-Uru, le gigantesque animal marin qui surgit des fonds marins pour annoncer des augures aux shaman. Pacifiques, les Ouvéens ont défendu leur monde avec une volonté farouche.
L'Iles des Initiés : quelque part perdue dans l'immense océan d'Aquablue se trouve une île « en creux » dans laquelle la mer se déverse. Tout au fond, Nao et ses amis ont trouvé l'entrée du temple sacré où se déroule le rite d'initiation des shamans d'Aquablue. Ce temple est également un accès au monde des Atalans.
La Cité englouti des Atalans : les Atalans sont les premiers habitants de la planète. Après avoir atteint un niveau très élevé de développement, une partie d'entre eux a voulu poursuivre ce développement en se modifîant génétiquement. L'échec fut cinglant, mais donna naissance aux Bleus. Les Atalans qui restèrent dans leur cité engloutie décidèrent de rester inconnus de leurs « cousins », tout en se gardant la possibilité de communiquer avec eux en cas d'absolue nécessité, via les Uruk-Uru et le médaillon de Nao.
Les Archipels : pour l'essentiel, la multitude d'archipels disséminés sur Aquablue nous est encore inconnue.

Quand as-tu découvert Aquablue ? Qu'est-ce que ça représente pour toi ?
J'ai découvert Aquablue vers le tome 2, je crois. J'aime bien les « messages » et les idées que la série véhicule, mais surtout, j'ai toujours aimé la façon dont tout ça est emballé sans prise de tête. C'est avant tout du fun. L'esprit de la série est assez riche pour être sérieux ou se prêter au gag en cinq pages, ce qui est plutôt rare. Et puis, ça trimballe implicitement plein de références partagées à la fois par un public large et par des fans de S-F plus pointus. Sans jamais être prétentieux ou élitiste. Le retour de la grande aventure, quoi ! (rires) Ça va pour le cirage de pompes ? (re-rires)

Tu connais déjà ce que tu vas devoir explorer graphiquement ?
Ah, ça ! « Toujours en mouvement est l'avenir », tu le sais bien. Il y a des idées dans l'air, plutôt sympas, d'ailleurs...

Une question à laquelle tu aurais envie de répondre ?
Tiens, une qu'on ne pose jamais : « Tu encres à la plume ou au pinceau ? » Faut dire que tout le monde s'en fout... Mais : pinceau à cartouche rechargeable, stylo et feutre à encre gel. Les stylos : Pilot.

Dossier réalisé par Thomas Ragon (Dans Pavillon Rouge N°13)


Fondation Aquablue : Nao parle!



Nao Morgenstern, merci d'avoir accepté cet entretien holographique, où vous trouvez-vous à l'heure actuelle ?
Nao : Mon équipe et moi sommes actuellement sur DOYLE-1 800, une planète située à peu près au...
Cybot: Tais-toi donc, grand nigaud ! KZT! Si tu donnes les coordonnées exactes, un régiment de pisse-copies va débarquer et nous empoisonner l'existence. Comme si nous n'avions pas assez à faire ici ! KLT! D'ailleurs, j'étais contre cette interview...

D. : A quoi ressemble cette planète ?
N. : Euh... Comparé à la Terre, l'endroit n'est finalement pas si dépaysant, et...
C. : Et ce n'est pas la peine d'accepter une interview si c'est pour dire n'importe quoi ! TRZ! Tu trouves qu'une planète ressemblant à notre Terre à l'époque de la préhistoire, ce n'est pas dépaysant ? TRB ! Des dinosaures partout, une végétation inconnue et luxuriante, des éruptions volcaniques toutes les cinq minutes, et tu n'es pas dépaysé ! FRT! Je vous jure...


D. : Quel est le but de ce voyage ?
N. : L'expédition DOYLE-1800 a été définie selon deux axes principaux. Primo, il s'agit de...
C. : Tu vas tout compliquer ! KRZ ! Contente-toi de lui dire que disposer d'une telle planète est une chance extraordinaire de comprendre ce qui s'est passé sur la nôtre avant l'apparition de l'homme ! BTZ ! Malheureusement, elle est condamnée à court terme par un cataclysme spatial, et nous devons capturer des spécimens de chaque espèce afin de les examiner après la disparition de leur monde ! KRT! Il faut faire simple avec les journalistes !


D. : Vous avez repris la direction du groupe Morgenstern, cela n'a pas dû être simple... ?
N. : Effectivement, cela n'a pas été simple ! D'ailleurs, je...
C. : À qui le dites-vous ? J'ai vraiment passé de mauvais moments et je me suis fait un sang d'encre ! FRK ! Quand M. Morgenstern a enfin pu jouir de l'héritage détourné par sa tante, il s'est retrouvé à la tête d'un des plus puissants groupes économico-industriels terriens, et les requins du conseil d'administration ont bien sûr essayé de profiter de sa naïveté. KZT ! Heureusement, je veillais au grain, et j'ai pris en main les intérêts de M. Nao... euh... Morgenstern... BRT ! J'ai remis tout ce petit monde au pas, et fait du ménage dans les comptes. Je dois dire sans me vanter qu'il y en avait grand besoin ! KLK!


D. :Vous avez créé la Fondation Aquablue. À quelle motivation cela répond-il ?
N. : À vrai dire, c'était un vieux rêve depuis...
C. : C'est Nao tout craché, ça! TRK ! 1 1 rêvasse et moi
je me décarcasse avec les contingences matérielles ! KLK! Vous n'imaginez pas les tracasseries qu'on rencontre lorsqu'on monte une fondation scientifique ! Ce n'est pas tout de décider qu'on va partir traquer la connaissance aux quatre coins de l'univers : il faut organiser la structure, la logistique, recruter et former le personnel 1 FRB ! Enfin, je ne m'en suis pas trop mal sorti. C'est même moi qui ai eu l'idée de baptiser Uruk-Uru le cargo spatial que nous avons racheté et équipé du matériel dernier cri. KRT! 

 

D. : J'étais il y a peu avec le professeur Rivage, qui étudie le Vdivode qui menace DOYLE-1 800, et j'ai assisté à la perte de la sonde qui avait pu explorer ce Vdivode... Que vous inspire ce tragique épisode ? 
N. : Le professeur Rivage est un ami, et nous sommes d'autant plus contrariés par cet incident que... 
C. : Une catastrophe, oui ! BRK ! Ce Voïvode est un phénomène unique dans l'univers, et il est apparenté aux trous noirs. C'est sa gravité qui menace d'aspirer et de détruire DOYLE-1800. BRZ ! Si Rivage et sa bande de bras cassés avaient construit correctement la sonde Icarus, les informations qu'elle rapportait auraient sans doute permis d'empêcher la disparition de cette planète ! TKR ! Mais voilà, ces gens-là reçoivent trop de subventions, et ils travaillent n'importe comment avec l'argent public ! ZRB ! J'en profite pour signaler que la Fondation Aquablue fonctionne exclusivement sur les biens personnels de M. Morgenstern, et que vos dons, qui sont les bienvenus, seront beaucoup mieux utilisés ici ! RTZ!

D. : Ma dernière question ce robot qui vous accompagne partout... Qui est-il ment, et quelle est fonction auprès de vous ?
N. IL ME FATIIIIIIIGUE
C. KZT ? Mais pourquoi ?